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Le site atelier de Breuil-Chenue : un suivi exceptionnel des sols forestiers

Questions de Nature

Le site atelier de Breuil-Chenue : un suivi exceptionnel des sols forestiers

Pour mieux comprendre le fonctionnement du sol en forêt et apporter des pistes pour une meilleure gestion, le site atelier de Breuil-Chenue accumule des données depuis des décennies.

Qu’est-ce que le site atelier de Breuil-Chenue ?

© Gilles Macagno

Il est situé dans le Morvan et constitue l’un des rares observatoires de recherche in situ français sur la forêt. Ce dispositif expérimental permet de mesurer comment réagit le sol forestier en présence de différentes essences et sous l’effet de différents traitements. Dans le contexte post-guerre des années 1960 où la forêt était très affaiblie par la surexploitation, l’objectif a été de redynamiser la filière sylvicole en produisant beaucoup, de manière rapide et simple. Sur un modèle productiviste calqué sur le modèle agricole, une sylviculture basée sur un apport d’amendements et d’engrais et sur une sélection de nouvelles essences aux provenances

jugées plus adaptées a alors vu le jour, sous la forme de monocultures équiennes : une seule essence avec des arbres du même âge. Le site-atelier de Breuil-Chenue a été créé en 1976, au moment où émergeaient des questionnements écologiques qui remettaient en cause le modèle, accusé d’acidifier les sols, de les assécher… Il s’agissait d’y apporter des réponses scientifiques.

Quels grands enseignements tirer du site atelier ?

Avant tout, le sol doit être abordé comme un compartiment d’un écosystème incroyablement riche et complexe, non de manière indépendante. Si les sols forestiers sont réputés pauvres, ils sont en réalité des systèmes dynamiques relativement équilibrés où vivent des organismes adaptés à cette relative pauvreté. Ainsi, les arbres puisent dans le sol et l’atmosphère les éléments dont ils ont besoin et les recyclent efficacement. À travers les feuilles, les aiguilles, les racines mortes et les branches tombées, 80 % de ce qui a été prélevé par la plante est restitué au sol. La minéralisation de la matière organique est assurée par une multitude de microorganismes, qui permettent aux arbres de profiter de nouveau des ressources du sol.

Que retenir en termes de gestion forestière ?

Grâce aux mesures initiales, puis aux nombreuses mesures effectuées au fil du développement de la forêt de Breuil-Chenue, les chercheurs ont pu mettre en évidence que la culture du Douglas stimule la nitrification* des sols, mais qu’un amendement très modeste en calcium et phosphore permet de redynamiser le système forestier. Plus que la plante elle-même, ce sont les microorganismes qui profitent de cet apport, dont les bénéfices perdurent dans le temps grâce au recyclage des éléments minéraux par les arbres. Pour étayer ces observations, un réseau de 22 sites de plantations de Douglas répartis sur toute la France a été mis en place avec les acteurs du terrain. Il a permis de confirmer le caractère général de la stimulation de la nitrification par le Douglas, et de démontrer, constat inattendu, que la richesse du sol n’est pas capable de limiter les pertes des nitrates non immobilisés dans l’écosystème.

Le mot de l’expert

Jacques RANGER, Directeur honoraire de recherche à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement de Nancy, laboratoire biogéochimie des écosystèmes forestiers, Conseiller scientifique du Parc naturel régional du Morvan

Pourquoi l’exploitation forestière est-elle aujourd’hui à un tournant ?

Les arbres plantés après-guerre sont prêts à être récoltés. C’est une opportunité pour le monde forestier, mais aussi un devoir, de reconsidérer le modèle de production en capitalisant sur les savoirs actuels. Opter pour des boisements mélangés, mieux prendre en compte les sols, arrêter de prélever les rémanents* ou stopper leur mise en tas, pour que la reconstitution des sols puisse avoir lieu et pour éviter l’érosion physique de sols… Il s’agit désormais de s’emparer des découvertes scientifiques qu’a notamment permis Breuil-Chenue pour privilégier une nouvelle exploitation de la forêt, plus durable. La forêt relevant du temps long, les choix actuels sont décisifs pour le futur.

Pour en savoir plus

Dans le hors-série n° 9 de la revue Bourgogne-Franche-Comté-Nature/Cahiers scientifiques du parc naturel régional du Morvan, découvrez plus en détail la forêt morvandelle et la problématique de la pérennité des sols forestiers.

Mini-glossaire

Nitrification: production de nitrates.

Rémanent: branches et autres restes issus des coupes forestières.

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