Bien connues des anciens pour leurs pouvoirs fertilisant et protéique, les Fabacées et leurs partenaires bactériens demandent à sortir de l’oubli.
Qui sont les Fabacées ?
Elles forment une très grande famille végétale regroupant des plantes sauvages et domestiques. Il en existe 17 800 espèces dont 360 en France. Les agronomes les appellent les « légumineuses » : pois, soja, luzerne, trèfles, féverole, haricots, lupins, vesces… Leur culture se décline en 3 grands modes d’utilisation : les légumineuses fourragères ou prairiales, dont on fauche les parties aériennes pour alimenter le bétail ou qui sont pâturées ; les légumineuses à graines, dont les graines sont récoltées pour l’alimentation humaine ou du bétail ; et les légumineuses de couverture, semées en interculture ou en accompagnement de culture. Autrefois, cultiver des légumineuses en tête de rotation avant de semer des céréales était courant, mais la pratique s’est raréfiée. Moins de 2 % des surfaces arables sont actuellement consacrées aux légumineuses en France.
Quel rapport particulier les Fabacées entretiennent-elles avec les bactéries du sol ?
Elles vivent en association avec certaines bactéries, essentiellement du genre Rhizobium (étymologiquement « qui vit dans la racine »). Cette relation est symbiotique, c’est-à-dire qu’elle est mutuellement bénéfique. La plante émet une molécule attirant la bactérie, qui s’installe dans ses racines, à l’intérieur de nodosités créées pour l’occasion. Émerge alors une nouvelle fonction que ni la plante, ni la bactérie ne possèdent seules : ensemble, elles sont capables de fixer l’azote atmosphérique gazeux présent dans l’air du sol pour le transformer en une molécule assimilable par la plante. Cet azote est indispensable à la croissance de la plante, pour fabriquer des protéines, dont les légumineuses sont particulièrement riches.
Pourquoi cette symbiose est-elle intéressante pour l’agriculteur et comment la favoriser ?
Le recours à des légumineuses enrichit le sol en diminuant l’emploi d’engrais azotés de synthèse issus d’énergies fossiles, souvent de gaz. Les engrais azotés représentent un coût lié à celui de l’énergie, qui a tendance à augmenter, ce qui devrait pousser à s’en affranchir. Par ailleurs, les engrais azotés industriels acidifient le sol, ce qui n’est par exemple pas propice aux vers de terre. Les Fabacées sont aussi plus favorables à la biodiversité grâce à leurs fleurs, sources de nectar et de pollen notamment pour les insectes auxiliaires et pollinisateurs des cultures. Pour que la fixation symbiotique ait lieu, la disponibilité en nitrates (une forme d’azote assimilable par la plante) dans le sol doit être faible, ce qui implique qu’il n’y ait pas une forte fertilisation minérale. En effet, comme l’opération de fixation de l’azote est coûteuse en énergie pour la plante, elle s’économise en prélevant d’abord les nitrates disponibles.
Geneviève CODOU-DAVID, Biologiste, Administratrice de la Société des Sciences Naturelles de Bourgogne
Le mot de l’expert
Dans notre pays, la culture des légumineuses a été divisée par 7 en 40 ans. Le rôle fertilisant des Fabacées a été détrôné par les engrais azotés de synthèse. Et l’apport de protéines pour l’élevage a été remplacé par des tourteaux de soja importés, importation facilitée par des accords commerciaux exemptant de droits de douane en échange d’export de céréales.
Une relance des légumineuses serait souhaitable sur tous les plans, mais impose une évolution de la situation. Elle requiert une politique volontariste globale pour qu’un débouché soit assuré, avec une réintroduction de la diversité dans les cultures. Le soutien à la recherche et au développement ainsi que l’attente environnementale des citoyens sont aussi déterminants pour redonner aux légumineuses un avenir.
Pour en savoir plus…
Le n° 35 de la revue BFC NATURE vous propose un article complet sur la symbiose entre Fabacées et bactéries du sol et sur ses atouts pour l’agriculture.