
Problématique majeure très rarement abordée, la préservation des sols est pourtant l’outil principal de l’agriculteur.
Qu’est-ce qui rend le sol si précieux ?
Longtemps, il n’a été considéré que pour sa fonction de support pour la production agricole et pour le filtrage et le stockage de l’eau. Or ces fonctions ne sont possibles que grâce à une intense activité de ce milieu vivant, qui abrite des vers de terre, des termites, des fourmis visibles à l’œil nu, mais surtout des micro-organismes. On évalue ainsi jusqu’à 10 milliards de cellules par gramme de sol ! Le sol renferme de 1 à 10 % de matière organique dans les 30 premiers centimètres. Ce sont 1 500 milliards de tonnes de carbone qui sont ainsi stockées, soit plus que le carbone contenu dans la végétation terrestre et dans l’atmosphère sous forme de gaz carbonique. C’est ainsi le second puits de carbone, après le phytoplancton et les algues des océans, et avant l’activité photosynthétique des végétaux chlorophylliens.
Pourquoi l’agriculture doit-elle impérativement veiller à préserver le sol ?
L’activité biologique d’un sol bien préservé est favorable au développement des végétaux cultivés. Elle protège les plantes, fournit des éléments fertilisants et améliore les rendements des cultures. Les pratiques agroécologiques* sont justement plus respectueuses des sols agricoles, qui ont la particularité de se dégrader très vite. Ces nouveaux itinéraires techniques permettent aussi de diminuer les intrants, notamment les fertilisants et produits phytosanitaires, et de concourir ainsi à une plus grande autonomie alimentaire en diminuant les achats extérieurs à nos frontières.
Pourquoi y a-t-il urgence pour les sols agricoles ?
En France, ce sont déjà 17 % des surfaces qui sont exposées aux phénomènes d’érosion en raison de l’appauvrissement en matière organique dû à des pratiques agricoles intensives. Qui plus est, la formation des sols est très lente : 1 millimètre par siècle, ce qui signifie que pour disposer d’un seul mètre de sol, il faut attendre 100 000 ans ! Le respect de la structure du sol doit également être pris en compte, c’est-à-dire de l’agencement des différents éléments le composant. Un sol vivant, c’est 50 % de « vide » pour laisser l’eau circuler et l’air pénétrer afin d’alimenter l’écosystème.

Alain DELAVEAU, Docteur ingénieur, membre du Conseil scientifique du Parc naturel régional du Morvan
Le recours à la chimie et à une mécanisation toujours plus performante a été nécessaire pour répondre aux besoins de la population, et nos agriculteurs ont répondu à cette demande sociétale. Mais aujourd’hui, c’est une nouvelle orientation qu’il faut adopter, car les externalités négatives de l’intensification sont avérées, y compris sur la santé humaine. Cette transition doit être réalisée avec un fort accompagnement et surtout en remettant en cause les modalités actuelles de soutien à nos agriculteurs. En effet, il faut absolument rémunérer l’impact positif de ces nouvelles pratiques, à la fois sur l’environnement et la santé. Je recommande vivement la lecture de deux ouvrages parus l’an dernier aux éditions Quæ : L’agriculture de conservation des sols, ouvrage collectif coordonné par Stéphane CORDEAU, Pierre-Alain MARON, Jean-Pierre SARTHOU et Bruno CHAUVEL, et La vie cachée des sols, de Philippe HINSINGER.
Pour en savoir plus
21e Rencontres BFC Nature – La nature la nuit
Rendez-vous les 19 et 20 septembre à la Maison de l’Économie, à Besançon (25) pour échanger sur le thème de la nature la nuit. Au programme : conférences, posters scientifiques ainsi qu’un espace stands et expositions. Pour s’inscrire et retrouver toutes les informations, rendez-vous sur la page : www.rencontres.bfcnature.fr.