Publié le 7 novembre 2022
Jusqu’ici resté incognito, le petit Géranium pourpre vient d’intégrer la liste de la flore côte-d’orienne.
Qui sont les géraniums ?
Les géraniacées sont des herbacées dont les graines sont reconnaissables par leur forme en bec de grue. Cette famille se divise en 3 genres principaux : Pelargonium (dont les espèces sont souvent nommées à tort « géraniums » dans les jardineries et qui n’existent pas à l’état sauvage dans nos régions), Erodium et Geranium (horticoles et sauvages). Dans ce dernier genre des géraniums, les fleurs ont 5 pétales et les feuilles simples sont plus ou moins découpées. Il en existe 27 espèces en France. Beaucoup se rencontrent dans les champs cultivés (on parle de plante « messicole »), quelques-unes sont inféodées aux lisières forestières, d’autres fleurissent jusque dans nos villes. Elles peuvent être annuelles ou vivaces, comme le Géranium sanguin, incontournable en Bourgogne : caractéristique des pelouses sèches des coteaux calcaires, il possède de superbes fleurs fuchsias assez grandes.
Comment avez-vous trouvé une nouvelle espèce en Côte-d’Or ?
La découverte a eu lieu durant le confinement, dans le jardin de l’Arquebuse à Dijon, où je travaille. J’avais vu la plante de nombreuses fois auparavant sans vraiment y prêter attention. Les fleurs particulièrement petites pouvaient certes interpeler, mais il est facile de s’imaginer que le contraste de taille s’explique par des aléas comme un moindre accès à l’eau.
Être contraint à rester sur un même terrain m’a encouragé à m’intéresser plus en détail à ce qui poussait autour de moi. C’est ainsi que j’ai identifié le Géranium pourpre, m’apercevant que le petit gabarit de ce géranium était dû à une différence d’espèce. Le Géranium pourpre est répandu dans le sud de la France. Il était déjà connu dans la Nièvre et l’Aude, mais pas en Côte-d’Or. Il faut dire qu’il peut facilement se confondre avec le Géranium Herbe à Robert, l’espèce de géraniums la plus commune, qui croît dans les mêmes milieux (éboulis, friches urbaines, murets…) et se mélange parfois à lui.
Quels critères permettent discerner le Géranium pourpre ?
Il a de toutes petites fleurs : ses pétales mesurent environ 5 mm alors que ceux du Géranium Herbe à Robert font plutôt 1 cm. De plus, le Géranium pourpre a des fleurs d’un rose plus vif, pourpre. Et ses anthères, qui renferment le pollen, sont jaunes et non pas orange. Après ma découverte, j’ai repéré plusieurs autres stations de l’espèce sur Dijon (rue Bertillon, boulevard de Chicago…) puis à Beaune, La Rochepot… Il est certain que Géranium pourpre est présent ailleurs sur le département, Chacun peut participer à sa prospection !
Le mot de l’expert
Johann LALLEMAND, Chargé d’étude préservation du patrimoine naturel au Muséum-Jardin de l’Arquebuse de Dijon et botaniste indépendant
Est-il fréquent de découvrir de nouvelles espèces de plantes sur la région ?
Ce n’est pas rare dans la mesure où peu de prospections sont menées de manière systématique. Si une espèce est répertoriée dans les départements limitrophes, mais est notée absente de la région, il y a fort à parier qu’elle n’a tout simplement pas été recherchée, mais qu’elle est bien là. Avec le changement climatique, on pourrait adopter une approche similaire en se demandant quelles espèces du sud pourraient être montées chez nous. Les découvertes nationales sont beaucoup plus exceptionnelles. Nous avons récemment trouvé Rumex stenophyllus en Côte-d’Or, une première en France. L’identification de cette herbacée a nécessité un long travail d’étude bibliographique, d’échange entre botanistes…
Pour en savoir plus
Un article avec des photos comparatives du Géranium pourpre et du Géranium Herbe à Robert sont à retrouver dans le n° 33 de la revue BFC NATURE.