Questions de Nature
La station forestière, paramètre incontournable pour le forestier
Pour le non averti, une forêt peut sembler un vaste ensemble uniforme. Le forestier y décèle quant à lui une succession de stations variées, déterminantes pour le mode de gestion.
Qu’est-ce qu’une station forestière ?
Pour définir une station, on examine un ensemble d’informations sur le milieu environnant : topographie (plateau, fond de vallon…), sol (profondeur, richesse chimique, présence de cailloux…), climat. La conjonction de ces éléments correspond à une station. Cette notion est apparue dans les années 1970 pour orienter les choix d’essences et la production forestière, chaque type de station étant favorable à certaines essences, pas à d’autres. Aujourd’hui, la notion de station croise celle d’habitat : c’est un milieu naturel où pousse une végétation spontanée spécifique, avec parfois des espèces rares qu’il convient de préserver. Certaines forêts, comme dans les Landes de Gascogne, comprennent des stations qui s’étendent sur plusieurs hectares. D’autres présentent une mosaïque de stations couvrant parfois quelques mètres carrés.
Comment identifier les stations sur le terrain ?
En Franche-Comté, on peut cheminer dans une forêt de plateau où s’observe la Myrtille et la Fougère aigle. En creusant, on rencontre des cailloux de silice (les chailles). Sur ce terrain aux contraintes assez fortes, d’une grande acidité et pauvre en éléments nutritifs, poussent naturellement des espèces peu exigeantes comme le Chêne sessile et le Pin sylvestre. Ces arbres y ont une croissance faible. Quelques mètres plus loin, le sol devient limoneux, plus profond, sans cailloux. Y pousse du chèvrefeuille. On retrouve le Chêne sessile, avec des arbres de plus grande taille, ainsi que du Hêtre et du Tilleul. Si on quitte le plateau pour atteindre un versant orienté au sud, le sol devient calcaire, caillouteux et peu profond. S’y rencontrent des orchidées et du Chêne pubescent, résistant à la sécheresse. En atteignant le fond de vallon, le sol profond, riche et humide accueille le Chêne pédonculé, le Frêne et l’Aulne glutineux.
Comment le forestier définit-il les stations et s’en sert-il ?
Il a recours à des cartes topographiques et géologiques qui l’aident à établir un zonage préalable des stations. Sur le terrain, il identifie la flore et effectue des prélèvements de sol à l’aide d’une tarière*. Il reporte les stations ainsi repérées sur un fond de carte, chaque station étant représentée par une couleur différente. Il dispose alors d’une carte qu’il utilise au quotidien pour choisir quelle essence planter, couper, etc. Avec le changement climatique, la carte des stations est aussi devenue une carte de vigilance ou de risques. Le Hêtre est par exemple plus fragile à la hausse des températures et à la baisse des précipitations. Sur des stations où il n’est déjà pas à son optimum, mieux vaut privilégier les autres essences du peuplement, plus résistantes.
Le mot de l’expert
Sylvain GAUDIN, Ingénieur au Centre Régional de la Propriété Forestière du Grand Est
Qu’est-ce qu’un forestier ?
“On le voit bien à travers l’enjeu des stations, ce n’est pas simplement une personne qui coupe du bois. Il a de nombreuses cordes à son arc et doit intégrer beaucoup de paramètres dans son travail. Il doit connaître les milieux naturels et savoir identifier non seulement les arbres, mais aussi plus d’une centaine de plantes du sous-bois. Il doit conjuguer économie, biodiversité, protection des eaux… et désormais intégrer l’évolution du climat. Le Centre National de la Propriété Forestière, établissement public œuvrant pour la gestion durable des forêts privées, a édité des guides sur les stations pour accompagner les forestiers. Il dispense aussi formations et conseils auprès d’eux.”
Pour en savoir plus
Rendez-vous sur le site Internet du Centre National de la Propriété Forestière pour comprendre en détail ce qu’est une station forestière et les outils développés sur cette thématique : www.cnpf.fr.