Retour sur une année à l’automne plus qu’estival jusqu’à mi-octobre…
Quel élément marquant retenir du bilan climatique de 2023 ?
À l’échelle planétaire, après plusieurs années La Niña qui avaient participé à refroidir la température, donc à masquer un peu la tendance au réchauffement, le phénomène contraire, El Niño, s’est déclenché. L’océan Pacifique s’est réchauffé, relâchant son énergie dans l’atmosphère avec entre autres conséquences l’accentuation de la chaleur. À l’échelle mondiale, 2023 est ainsi devenue l’année la plus chaude jamais vue depuis au moins 100 000 ans. Dès le 4 juillet, puis à plusieurs reprises dans les jours qui ont suivi, le record absolu de température planétaire a été battu. En France, il est difficile d’évaluer les répercussions d’El Niño et nous avons débuté l’été en ayant le sentiment de vivre une saison normale. Certes, la situation était moins critique qu’en 2022, mais il ne s’agissait en aucun cas d’une année normale. Les précipitations étaient déficitaires et les températures anormalement élevées. Nous nous sommes déjà habitués à l’exceptionnel !
Quelle a été la trajectoire sur notre région ?
L’année 2023 a commencé dans l’inquiétude avec une mauvaise recharge hivernale de la ressource en eau. Quelques pluies printanières ont limité une aggravation et les récoltes agricoles n’ont pas été trop mauvaises. Puis, c’est le caractère tardif des chaleurs qui a frappé. En effet, l’été s’est remarquablement prolongé, tant en termes de températures que d’absence de pluies. Septembre fut le plus chaud mesuré en France. En Bourgogne-Franche-Comté, les températures furent 4,4 °C au-dessus des moyennes de septembre, plus chaudes même que les moyennes de juillet et d’août ! Après Centre-Val de Loire, notre région fut la deuxième plus touchée par les anomalies de température de septembre. Le 8 octobre, il faisait encore plus de 30 °C à Marigny-le-Cahouët, Montbard, Ourches… 30 stations ont battu les records de valeurs maximales. Le 15 octobre, arrivés à la moitié de l’automne météorologique, nous étions toujours confrontés à un niveau de ressource en eau extrêmement bas. Les arrêtés préfectoraux départementaux restreignant les usages de l’eau étaient reconduits, au moment où les pluies auraient dû commencer à reconstituer les réserves.
Comment expliquer une telle persistance de la situation ?
De mi-août à mi-octobre, la permanence de conditions anticycloniques* a créé un dôme d’air très chaud en altitude qui empêchait de façon quasi continue l’entrée de perturbations. La vague de chaleur de fin août a davantage frappé le sud de la France que notre région du fait du positionnement du maximum de pression de l’anticyclone. À cette période, des perturbations venues de l’Atlantique étaient encore permises au nord. En septembre-octobre, l’anticyclone s’est légèrement déplacé. De telles positions et persistances anticycloniques ne sont pas inédites, mais étaient intervenues dans un contexte moins chaud.
Yves RICHARD, Professeur au Centre de recherches de climatologie, laboratoire Biogéosciences, Université de Bourgogne
Le mot de l’expert
Les pluies de juillet en Bretagne ont été montées en épingle par des climato-sceptiques, comme cela sera sans doute le cas avec le moindre événement météo supposé contradictoire. Malgré les preuves scientifiques et les constats que tout un chacun peut faire dans son quotidien témoignant du changement climatique en cours, on assiste à un emballement de climato-scepticisme assez paradoxal. Cet été qui ne se terminait pas doit pourtant nous inciter à agir pour limiter les dégâts en diminuant de toute urgence nos émissions de gaz à effet de serre et en développant des stratégies d’adaptation. En Bourgogne-Franche-Comté, 2023 voit la mise en place d’un Groupe Régional d’experts sur l’Évolution du Climat (GREC), version régionale du Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC).
Pour en savoir plus
Un article paru dans cette même rubrique, Canicules et sécheresse 2022, quand l’exception s’annonce la règle, est à retrouver sur https://bfcnature.fr/questions-de-nature-2022.
Mini-glossaire
Anticyclone : zone de l’atmosphère où la pression est plus élevée.